Chaque année, les dictionnaires Le Petit Robert et Le Petit Larousse enrichissent leur contenu avec de nouveaux termes, souvent inspirés par le langage des jeunes générations. Pour l’année 2024, pas moins de 150 nouveaux mots ont été introduits dans ces deux références de la langue française. Parmi ces ajouts, on trouve des expressions comme « avoir un crush », qui signifie « avoir un coup de cœur », ou le verbe « bader », dérivé de l’anglais « bad », signifiant littéralement « être dans le mal », autrement dit « ressentir de l’inquiétude, de la tristesse ou de la mélancolie ». En 2023, l’expression « être en PLS », traduisant l’idée de « se sentir mal, n’en pouvoir plus », avait fait son entrée dans les dictionnaires. Selon la définition du Robert, elle est équivalente à l’expression courante chez les jeunes : « être au bout de sa vie ».
Mots-clés du langage jeune
Il y a beaucoup d’autres mots qui sont spécifiquement utilisés par les jeunes, bien qu’ils ne figurent pas tous dans le dictionnaire. Ce sont souvent des « tics de langage », ces expressions habituelles qui parsèment les discours sans être vraiment nécessaires. Françoise Nore, linguiste spécialisée en lexicologie, interviewée par Le Figaro Étudiant, explique que ces tics se distinguent en deux catégories : les « béquilles de langage », comme le fameux « du coup », et ceux qui servent à accentuer ou enrichir un propos, à l’image de « choqué ». « On entend fréquemment les jeunes dire ‘Je suis choqué’, alors que ce terme relève normalement du vocabulaire médical », précise-t-elle. Cependant, qu’importe la catégorie, la linguiste affirme : « Ces tics de langage n’ont aucune utilité au quotidien ».
Évolution des tics de langage
Les tics de langage ne cessent d’évoluer au fil du temps. « Ils suivent une tendance. Ils apparaissent, puis s’évanouissent, remplacés par d’autres termes », explique Françoise Nore. L’un des plus anciens tics de langage est « en fait ». « Cela fait une trentaine d’années qu’il s’impose dans les discours », note la linguiste. Mais c’est un autre mot qui est désormais très présent dans le langage des jeunes. « À mon avis, il est assez irritant », confesse Françoise Nore. Dérivé du latin gravis, cet adjectif décrit ce qui est « imposant, puissant, sérieux ». Il est utilisé comme synonyme de « pénible » ou « embarrassé ». « Aujourd’hui, il est devenu une sorte d’exclamation pour exprimer aussi bien de la satisfaction que le contraire », résume Françoise Nore.
Comment se défaire de ces tics ?
Comme vous l’aurez deviné, ce mot si couramment utilisé depuis environ quinze ans est l’adjectif « grave ». « C’est une simplification de la communication. Au lieu d’élaborer une phrase plus précise, on se contente de cet adjectif passe-partout », constate la linguiste. Pour réduire l’utilisation de ces tics de langage, Françoise Nore suggère que « la seule solution est véritablement d’en prendre conscience et de s’efforcer de s’en libérer en faisant attention à notre manière de parler ».